Cette chanson raconte de façon étrange et poétique une tentative de séduction d’une artisane par trois militaires. Cette dernière semble avoir un pouvoir sur eux, en particulier sur le plus jeune qui se fait raser et qui passe aux aveux.

Le refus de l’amour proposé est fait avec finesse, et la chanson ne dit pas ce qui se passe après.

Le texte parle de la naissance impromptue de l’amour, de la honte des sentiments dans un moment d’intimité partagée qu’est ici le rasage, et qui sert de situation symbolique.

Très souvent, cette chanson fait entendre une mélodie complexe et très belle, mais les airs peuvent être très variables d’une version à l’autre.

Version 1

Dans Paris y a t-une barbière

Chanté par Marie Brun, dentellière de La Pénide de Saint-Hostien et enregistrée le 31 octobre 1960 par Jean Dumas

Réf. Coirault : 701 La barbière

Réf. AMTA : JD_a082_06

Fiche Jean Dumas : 980

Dans Paris y a t-une barbière / qu’elle est si belle que le jour

Sont trois jeuness’ capitaines / tous’ trois voulant lui fair’ l’amour

On dit que vous êtes barbière / la barbe faudra nous raser

Entrez entrez dedans ma chambre / tous mes rasoirs sont préparés

Tout en leur faisant la barbe / elle en changea trois de couleur

Monsieur si mes rasoirs vous blessent / pourquoi ne vous plaignez donc pas ?

Ce n’sont pas vos rasoirs la belle / ce sont vos tendres amitiés

Mes amitiés sont à la guerre / peut-être n’en reviendrons pas

L'interprétation de la chanteuse est typique du style de la chanson narrative traditionnelle en Haute-Loire :

  • Le rythme est plutôt rubato, libre, mais sous-tendu par une cadence intérieure qui n’est pas matérialisée par un tempo.
  • Cette cadence est ponctuée d’ornementations (plusieurs notes rapides sur une même syllabe) et de notes allongées qui servent de repères rythmiques.
  • Les notes terminant les motifs mélodiques sont systématiquement tenues.
  • Les hauteurs des altérations sont relatives et donnent une couleur bien particulière (les bémols sont un peu plus hauts qu’habituellement, et les dièses un peu plus bas : cela est indiqué par des flèches sur les altérations. Il est bien sûr possible de faire les altérations normalement).

Version 2

Dans Paris y a un’ barbière

Réf. Coirault : 701 La barbière

Réf. AMTA : JD_a056_04

Fiche Jean Dumas : 754

Chanté par Pauline Chazal, 81 ans, dentellière à Rosières et enregistrée le 30 juillet 1960 par Jean Dumas

Dans Paris y a une’ barbière / qu’elle est si belle que le jour

Y sont trois jeunes capitaines / tous trois veulent lui faire l’amour

Bonjour madame la barbière / la barbe la feriez-vous ?

Oh oui oh oui mes bons monsieurs / tous les rasoirs sont prêts pour vous

Y n’en fut pas moitié rasée / trois fois n’a changé de couleur

Si c’est mes rasoirs qui vous blessent / pourquoi ne le dites-vous pas ?

Ce n’sont pas vos rasoirs la belle / c’est vos beaux yeux tant amoureux

Ils sont pour un amant que j’aime / qui reviendra dans quelques jours

L’interprétation est sobre sans éléments particuliers de style si ce n’est la cadence particulière imprimée par les noires où on attendrait plutôt des noires pointées. Ce procédé rythmique est très courant et paradoxal : il consiste à allonger une note, mais à écourter suffisamment cet allongement pour éviter la lourdeur d’une cadence régulière.

On note la modalité particulière de la mélodie : on est en ton de La, et il s’agit d’un « mode de ré », connu aussi sous le nom de « dorien », c’est-à-dire d’un mode mineur caractérisé par une septième basse (ici, sol) et une sixte haute (ici, fa#), donnant une couleur particulière. C’est le mode le plus couramment employé pour cette chanson en ce qui concerne la Haute-Loire.